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Égalité filles - garçons : vers une éducation hypersensible au genre ?

L’éducation en Haïti a-t-elle pour mission l’épanouissement des jeunes des deux sexes ? Loin de là ! Nos écoles ont toujours été l’espace de reproductions des inégalités sociales par excellence. Quant aux préjugés liés au sexe, n’en parlons pas !

Des élèves jouent sur la cour de leur école
Crédit Photo : Iauhun (Pixabay)

Ces derniers jours, les velléités en faveur d’une éducation sensible au genre ont pris une toute nouvelle ampleur. Mais comment y parvenir sans créer plus de frustrations à côté des autres inégalités et préjugés ?

Notre système scolaire : un système d’inégalités

C’est là ma première inquiétude. Nous avons une éducation à vitesses multiples. D’une part, nous retrouvons les  » grandes  » écoles où les familles huppées inscrivent leurs enfants. Les curriculums varient d’une école à l’autre. Sans oublier les autres… Les écoles du bas peuple : les lycées, les collèges qui pullulent dans les quartiers défavorisés, sans contrôle de l’État.

Au sein de ces écoles qui s’apparentent au système carcéral haïtien, une cinquantaine d’innocents, côte à côte, expient les péchés de leurs ascendants : la couleur noire, les origines rurales, la pauvreté, et j’en passe. Les discriminations sont les causes inavouées des échecs scolaires de nombreux parmi ces enfants. 

Les stéréotypes de genre et l’autonomisation des femmes

Certaines discriminations représentent un obstacle à l’autonomisation de certaines catégories sociales. L’infime participation des femmes dans les sphères décisionnelles du pays est une grande preuve. Le sexisme et les stéréotypes de genre y sont pour beaucoup. Car l’image de la femme est attachée à une certaine incompétence dans les postes de décision.

Pour une éducation sensible au genre

Bonne nouvelle… Des âmes bien intentionnées en Haïti veulent s’attaquer à ce problème, comme les organisations féministes. Tout comme l’OIF qui appuie un programme d’accompagnement d’éducatrices et éducateurs sur l’égalité de genre. Toutefois les résultats semblent encore être très loin. Vu que le personnel éducatif est déjà dépassé par les différents problèmes des élèves. 

Mais comment l’éducatrice ou l’éducateur pourra-t-il s’y prendre sans risquer de négliger d’autres éléments importants de la vie de l’enfant à force de se concentrer sur l’aspect genre. Quitte à passer à côté de certains signes de souffrance. Comment ne pas être hypersensible au genre ? Et comment embrasser chaque enfant dans son intégralité et son unicité sans créer plus de frustrations et de tensions ?

Chaque enfant est l’histoire de sa famille et porte dans son ADN tous les maux et toutes les contradictions de sa société. Face à chaque enfant, l’éducatrice ou l’éducateur rencontre sa trajectoire familiale, les blessures de sa classe sociale. On ne peut prétendre au changement sans la prise de conscience de toute cette complexité de l’enfant qui risque de faire écho avec la réalité de l’enseignante ou l’enseignant sous-valorisé. Cela requiert la prise de conscience de ses propres préjugés vis-à-vis de chaque enfant. 

Deux filles et un garçon qui sourient
Crédit Photo : georgephoto (Pixabay)

Pour des politiques publiques sur l’égalité de genre

Pour ce qui est de l’atteinte de l’égalité de genre, cela ne sera pas possible sans un changement des conditions de vie globale de la population. Cela dit, cette égalité n’est envisageable sans la redistribution des richesses et une répartition équitable de l’économie qui tient compte des besoins économiques des filles et des femmes. L’indépendance économique des femmes est plus que vitale.

D’autre part, l’heure est aux avancées dans les secteurs clés comme la politique et la justice. Il nous faut de véritables politiques publiques et des textes de lois pour assurer une plus grande représentativité des femmes dans la politique et l’économie et promouvoir leur accès aux postes de décision dans les entreprises et les institutions locales. Le problème est encore plus complexe qu’il n’en a l’air et devra engager tous les secteurs de la vie nationale. 

Face à ce défi de taille, l’éducation a un grand rôle à jouer. Attaquer le problème par l’éducation c’est prendre acte d’un possible changement. Le pédagogue brésilien, Paulo Freire, l’avait si bien formulé : « Éduquer c’est croire au changement ».

Une fille debout en salle de classe écrit des notes dans son cahier
Crédit Photo : Pieter01 (Pixabay)
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Auteur·e

abimaelromilus

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